Communiquer efficacement dans les équipes distantes

Quel outil au service de l’efficacité de la communication dans les équipes distantes

Dans un ouvrage de référence en sociologie, « The Social Construction of Reality » (Berger & Luckmann, 1966), les auteurs montrent que les interactions régulières sont la base de la société. Ses membres construisent lors de ces interactions une culture partagée (normes, comportements..), une langue commune, ce qui facilite la coopération.

Comment faire pour construire une culture commune, ces évidences partagées qui font qu’on se comprend à demi-mot, dans les équipes distantes quand les liens sont souvent réduits aux liens formels, les relations informelles limitées et médiatisées par la technologie ? Et plus important encore, comment partager une réalité commune quand il n’y pas unité de lieu ?

Sans réalité partagée ni culture commune, comment construire la confiance, communiquer efficacement, susciter la coopération et la collaboration ?

Pour les équipes distribuées géographiquement, le monde du “co” n’est qu’un vœu pieux sans réponse concrète à ces questions ; dans les équipes où le fonctionnement à distance s’impose soudainement (confinement), ce monde du “co” s’effrite. S’il n’y a pas de solution magique, il y a un outil qui peut grandement nous aider.

L’échelle d’inférence

Evoquée dans « Overcoming Organizational  Defenses » (Ed Allyn & Bacon, 1990), par Chris Argyris : elle permet de comprendre le processus de construction de nos interprétations des faits et des facteurs qui l’influencent, soit : 

  • Nos filtres culturels (culture d’entreprise, interculturel)

  • Et nos filtres personnels (croyances, valeurs, manière de penser…)

Chris Argyris, auteur de référence sur l’organisation apprenante, s’en est servi pour rendre visible les obstacles à la performance liés à nos « modèles mentaux ». L’échelle d’inférence peut également être utilisée pour mieux communiquer.

Nous utiliserons une version actualisée extraite de « The fifth Discipline Fieldbook » (Ed Nicholas Breadley, Peter Senge, 1994)

Que faire ?

En tant qu’émetteur d’un message, l’idée est de “descendre l’échelle d’inférence”.

c’est-à-dire que cet outil nous invite à faire part à notre interlocuteur non seulement de nos conclusions et décisions mais aussi des faits sur lesquels nous prenons appui et de notre raisonnement. Ainsi, la réalité que nous prenons en compte, nos représentations deviennent plus visibles. Cela permet à notre interlocuteur de mieux comprendre les faits sur lesquels nous prenons appui et d’identifier les grilles d’analyse et les interprétations qui sont les nôtres. Il pourra ainsi poser des questions plus pertinentes, souligner les failles de notre raisonnement, proposer d’autres interprétations ou analyses ou compléter nos informations. 

Il peut également faciliter “la descente de l’échelle d’inférence”en pratiquant l’écoute active : le silence, l’attention à ses propres ressentis, les questions, la reformulation, l’attention au non-verbal mais aussi en écoutant la structure de la pensée de l’autre, ses hypothèses, ses croyances, son modèle du monde.

Une véritable conversation peut alors se déployer, chacun étant tour à tour récepteur et émetteur.

Exemple :

Géraldine : Bonjour Paul, comment vas-tu ? Je souhaite te parler d’une décision que je compte annoncer la semaine prochaine.

Un des membres de mon équipe, John, m’a demandé de prendre la responsabilité du projet que nous démarrons en Inde, et j’ai décidé de lui dire non. Cela fait 2 ans qu’il a rejoint mon équipe d’experts et c’est son premier poste. Jusque là, il a bien mené les projets que je lui ai confiés. Au plan des compétences techniques, il mérite d’évoluer. Ce projet est néanmoins complexe : il nécessite de bien connaître le pays, la façon de procéder avec l’administration et l’équipe-projet comprend des personnes expérimentées.
Au regard de mes interactions avec lui, des retours de certains de ses collègues, il semble perdre facilement confiance en lui lorsque les choses ne se passent pas comme prévu. Et sur ce projet, les choses ne vont pas se passer comme prévu …souvent : il y a en effet de nouveaux partenaires, notre volonté est d’introduire nos dernières innovations Process. Bref, je préfère attendre 2 ans avant de le faire évoluer.

Paul : Je comprends bien ta décision, et ce qui te conduit à la prendre, Géraldine. Qu’est-ce qui te fait croire que 2 ans suffiront à John pour être prêt ? Et quelles seront les conséquences sur son engagement ?

Géraldine : Et bien, mon expérience de management dans cette fonction m’a montré qu’il fallait 4 ans d’expérience à une jeune recrue pour être en maitrise du poste, pour être à l’aise avec la culture d’entreprise et avoir compris son organisation. Quant à ton second point, j’y ai pensé bien sûr, très rapidement. Et je n’ai pas encore de stratégie très aboutie à ce sujet.

Paul : A part la question de l’expérience, je me demande s’il y a d’autres points qui te font hésiter ? Comment comptes-tu tenir compte de l’impact sur son engagement ?

Géraldine : à la réflexion, ce manque d’assurance au bout de 2 ans d’expérience m’intrigue. Je vais planifier une discussion avec lui. Peut-être qu’un soutien un peu plus régulier de ma part serait utile ? Merci Paul : je maintiens ma décision mais je vais m’assurer de tout mettre en place pour que John réussisse et reste engagé dans son travail.

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L’échelle d’inférence

ConsultantSF Conseil